Obsèques de Paul Chollet : discours de Jean Dionis
Retrouvez le discours de Jean Dionis, mairie d'Agen, prononcé le 16 décembre 2022 à la Cathédrale Saint-Caprais d'Agen

Cher François, cher Jean-Baptiste, cher Pierre, chère Véronique, chère Emmanuelle,
Chers membres de la famille du Docteur Chollet,
Chers amis du Docteur Chollet,
Avec l’accord de ses enfants, j’ai le privilège d’exprimer à la fois le Merci et l’Adieu d’Agen à l’un de ses Maires les plus aimés et l’un de ses plus illustres serviteurs.
Je le fais en mon nom personnel mais aussi en tant que Maire, au nom du Conseil Municipal de la Ville d’Agen et, au travers de son Conseil Municipal, au nom de tous les Agenais.
Permettez au Maire d’Agen de concentrer son regard et son propos sur la relation passionnée qu’entretenait le Docteur Chollet avec sa ville d’adoption et sur l’empreinte qu’il laissera sur sa ville et dans le cœur des agenaises et des agenais.
En écrivant ses lignes, je me suis interrogé. Pourquoi en 1989, Agen choisit le Docteur Chollet comme Maire ? Pourquoi Agen, à cette date, s’est reconnue dans le Docteur Chollet et a fait de lui son Maire et son chef du village, comme le dise les enfants.
Les raisons vous les connaissez : le Docteur Chollet à Agen, ce fut d’abord un rayonnement exceptionnel de médecin, un citoyen pleinement engagé dans la vie associative, un couple avec sa femme Monique et une famille avec ses 5 enfants porteurs d’une joie et d’une énergie de vivre véritablement extraordinaire, et enfin, une grande finesse et une grande culture générale et politique.
Le premier rendez-vous électoral du Docteur Chollet avec les citoyens agenais date de 1981 lors de son élection comme conseiller général d’Agen-Centre.
Déjà, alors que la France est en pleine vague rose, il est élu à contre-courant de la tradition politique agenaise qui, en général, suit les grands vents électoraux nationaux.
De manière plus prévisible, il devient député en 1986 lorsque la loi instaure la proportionnelle départementale.
La force de sa personnalité lui permet d’être réélu en 1988, encore à contre-courant, lorsque François Mitterrand dissout l’Assemblée Nationale dans la foulée de sa réélection… démontrant, une nouvelle fois, la force du lien très personnel qu’il entretenait avec les citoyens et notamment les agenais.
C’est donc naturellement que sa famille politique au sens large, le Centre et la Droite républicaine, lui confient la tête de liste aux élections municipales à Agen en 1989.
Agen choisit le Docteur Chollet comme Maire en 1989 et le réélit en 1995. Deux mandats, 12 années. Sur ces douze ans, 8 années de Député-Maire et 4 ans uniquement concentrés sur le mandat de Maire. Sans oublier le mandat de Président de l’Agglomération d’Agen qu’il va tenir pendant 6 ans lors de son premier mandat municipal.
J’ai été un spectateur privilégié de ces 12 ans et je tenais à partager avec vous ce que j’ai appris du Docteur Chollet.
Premièrement : le travail.
C’est souvent un angle mort dans les témoignages apportés par ses proches, le Docteur Chollet était un travailleur acharné. Il l’était comme médecin, il l’a été comme Maire.
Que ce soit dans l’étude des dossiers municipaux ou dans les relations humaines sur le terrain, le Docteur Chollet mettait une énergie rare à comprendre d’abord les situations, à essayer ensuite d’apporter des solutions.
Très humain, avec ses concitoyens, très dur avec lui-même, le Docteur Chollet apportait à chacune et à chacun des agenais : considération, écoute, temps… malgré un emploi du temps de député-maire épuisant.
Oui, le Docteur Chollet nous a appris et rappelé que les élus de la République devaient d’abord, dans le cadre de leur mandat, travailler.
Deuxièmement, le refus du sectarisme, ce qui était novateur à l’époque. Remettons-nous en situation. En 1989, la vie politique nationale et locale était plus clivée, plus manichéenne, plus sectaire qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Guidé par une volonté et une pratique permanente de dépassement de ces clivages surfaits et anesthésiants, le Docteur Chollet était un passionné du rassemblement de toutes les forces de sa ville, à la seule condition qu’elles soient bienveillantes…
Ce refus du sectarisme l’amena à poser des gestes audacieux et novateurs, que ce soit dans la constitution de son équipe municipale avec l’ouverture de celle-ci aux écologistes et aux radicaux de gauche ou dans la qualité du dialogue qu’il menait avec son opposition municipale.
Oui, nous avons appris du Docteur Chollet, le refus du sectarisme.
Troisièmement : l’obsession de l’influence agenaise.
Le Docteur Chollet fut, pour Agen, un formidable député-maire. Il avait d’emblée compris l’importance de la synergie entre ses deux principaux mandats pour construire ce qu’il estimait être la nécessaire influence nationale de la Ville d’Agen.
Et lorsque l’histoire de la France moderne a pu offrir certaines opportunités majeures à notre Ville : Agen, grâce à son député-maire, était prête.
- Prête à saisir l’opportunité de la déconcentration des écoles supérieures nationales et à gagner la compétition territoriale de l’Ecole Nationale d’Administration Pénitentiaire avec l’appui de Pierre Mehaignerie, alors Garde des Sceaux, et avec qui il avait tissé une relation particulière au sein du groupe CDS de l’Assemblée Nationale.
J’ai eu Pierre ce matin au téléphone, il m’a chargé de vous dire qu’il était avec nous par la pensée et le cœur cet après-midi.
- Prête, lorsque l’armée française se restructurait autour de son plan « Armée 2000 », à gagner la compétition, car cela en été une, de la constitution du 48ème Régiment de Transmissions et de son implantation à Agen ;
- Prête aussi, en tandem avec le président du Conseil Général de l’époque Jean FRANÇOIS-PONCET, à se saisir du plan « Université 2000 », pour faire d’Agen la ville universitaire qu’elle est aujourd’hui, fière de ses 3 000 étudiants.
Oui, nous avons appris et de manière plus personnelle, j’ai appris auprès du Docteur Chollet, comment construire patiemment avec obstination la nécessaire influence de notre ville là où elle doit être entendue.
Quand, en 1997, les électeurs d’Agen-Nérac, ne lui ont pas renouvelé leur confiance, comme a su très bien en témoigner Bernard Lusset, il a quitté son mandat de député avec tristesse mais sans amertume et avec gratitude envers la démocratie et les électeurs.
Il a consacré les quatre dernières années de son mandat de Maire à se réinventer comme celui de toutes les proximités.
Et c’est la phrase de Saint-Paul qui me vient à l’esprit lorsque je pense au Docteur Chollet de cette période de 1997 à 2001 : « je me suis fait tout à tous ».
Quelle leçon pour moi, adjoint à ses côtés, de voir le Docteur Chollet à l’aise et heureux au centre-ville, dans nos beaux quartiers de la Préfecture et des boulevards, et de le voir en même temps, au travail mais heureux et adulé dans nos cités, à Montanou, à Rodrigues, à Tapie.
De le voir chrétien parmi les siens dans cette Cathédrale et, engagé dès le premier jour, pour que nos concitoyens musulmans aient aussi, à Agen, un lieu de culte décent.
De le voir pédiatre toujours avec les jeunes d’Agen, et en même temps, profondément humain avec nos anciens.
La voilà, la leçon de sciences politiques du Docteur Chollet appliquée à Agen : du travail, toujours ! du sectarisme, jamais ! de la ténacité pour construire au niveau départemental, régional, national la reconnaissance nécessaire à sa ville et enfin être le Maire de toutes et de tous.
Chaque jour, la municipalité d’Agen, le Maire que je suis, faisons mémoire de cet héritage.
Aujourd’hui, François, Jean-Baptiste, Pierre, Véronique et Emmanuelle, je vous en fais serment. Nous ferons mémoire de votre père.
La Ville d’Agen exprimera sa gratitude pour tout le bien que le Docteur Chollet a fait à sa ville et à ses habitants.
Nous choisirons avec vous, sa famille, ses enfants, les chemins que prendra ce travail de mémoire pour qu’il reste, pendant longtemps pour nous, pour cette jeunesse qu’il aimait tant et pour des générations d’agenaises et d’agenais, une source d’inspiration et d’humanité.
Au nom du Conseil Municipal de la Ville d’Agen et de tout le peuple agenais, je vous présente, François, Jean-Baptiste, Pierre, Véronique et Emmanuelle, ainsi qu’à toute votre famille, nos plus sincères condoléances et l’expression de toute notre sympathie.
Publié le 19/12/2022